La tour de Babylone
		Chiang, Ted Edition : Folio SF 2010, 416 pages ISBN : 978-2-07-040688-3 7,10 €

Ce recueil de sept nouvelles, dont plusieurs ont été primées, est d'une grande homogénéité de style. Il regroupe :
La Tour de Babylone : les ingénieurs de Babylone ont décidé de construire une tour suffisamment haute pour transpercer la voute du ciel afin de voir ce qui se trouve au-delà. Certains des maçons qui la construisent y passent aussi leur vie, avec femme et enfants.

Comprends : un homme rescapé d'une lourde hypothermie par une "molécule miracle" voit ses capacités intellectuelles grandement multipliées, jusqu'à en faire un surhomme. Mais il vivra mal la découverte qu'il n'est pas le seul de son espèce.

Division par zéro décrit le désespoir d'une mathématicienne pour qui l'univers a perdu tout sens après qu'elle a démontré l'absurdité de base de l'arithmétique.

L'histoire de ta vie : la vie d'une linguiste change du jour où on lui demande de traduire des aliens, dont le mode de langage n'a rien à voir avec le nôtre. Cette nouvelle suggère une intéressante réflexion sur le libre arbitre et la pré-détermination, notamment par son écriture.

Soixante douze lettres : dans une ambiance steampunk, cette nouvelle décrit une révolution industrielle basée sur des automates fonctionnant grâce aux Noms kabbalistiques, pendant laquelle des chercheurs cherchent à enrayer, grâce à cette Science, la disparition prévue de l'humanité.

L'évolution de la science humaine : ou comment celle-ci peut évoluer alors que l'étape suivante de l'évolution de l'humanité a de facto réservé les découvertes aux "métahumains".

L'enfer, quand Dieu n'est pas présent : dans un monde où les visitations angéliques sont fréquentes, et possiblement catastrophiques, une méditation sur la nature du Ciel, de l'Enfer et de la piété, sur fond de Livre de Job.

Aimer ce que l'on voit : un documentaire : afin de se défendre contre la "tyrannie de la beauté" et son influence inconsciente, il existe une méthode pour éviter de la voir. Certes la solution n'est pas aussi radicale que celle présentée, à un autre propos, dans le Limbo, de Wolfe, mais quand même assez effrayante.

S'il y avait un thème commun à ces nouvelles individuellement brillantes, ce serait sans doute comment pallier la perte, ou l'absence, en un mot le manque. Elles ressortissent au genre de la SF, en général, même si Soixante douze lettres se classerait facilement dans le courant Steampunk, et L'enfer, quand Dieu n'est pas présent (les anges ne sont pas les ET auxquels pensent couramment les lecteurs de SF !), ou même La tour de Babylone, carrément en fantasy ou fantastique. On ne peut pas véritablement parler de Hard Science. Certes, Division par zéro met en scène une mathématicienne, mais le thème de fond est celui de la perte du sens de la vie, les raisonnements mathématiques n'étant qu'accessoires.

Ces histoires sont toutes originales et intéressantes, et il était sans aucun doute nécessaire de les ré-éditer au format poche, afin de donner au plus grand nombre de lecteurs une chance de les lire.