Ombre (Le Charognard - Tome 1)
		Parker, K. J. Edition : Bragelonne 2010, 570 pages ISBN : 978-2-35294-384-6 25 €

Se réveiller amnésique au milieu d'un carnage sanglant, c'est perturbant. Se quereller systématiquement avec tous les gens susceptibles de fournir des informations intéressantes et devoir les tuer avant qu'ils le fassent, c'est également frustrant. Si en plus les morts en question laissaient entendre qu'on est quelqu'un de particulièrement peu recommandable, cela devient tout bonnement exaspérant !

Cependant, il faut bien vivre. Ne pouvant se rappeler son nom, l'inconnu adopte celui d'une divinité mineure, Poldarn, le dieu aux corbeaux qui doit provoquer la fin du monde. Pour gagner sa croûte, il se fait passer pour tel dans les villages qu'il traverse en chariot en compagnie d'une comparse. Et les coïncidences s'accumulent : la légende dit en effet qu'avant de déclencher la fin du monde, le dieu sans mémoire arpentera le royaume en chariot avec sa prêtresse, semant le désastre partout où il passe. Et puis, il y a ces rêves dans lesquels l'homme voit des versions légèrement déformées du passé ou du futur, qu'il oublie à son réveil mais lui laissent un sentiment trouble... Et ces corbeaux qu'il voit partout... Qui est réellement Poldarn ? Maraudeur, moine bretteur, soldat, ou dieu amnésique ?

Ce tome d'introduction de la nouvelle trilogie de K.J. Parker annonce tout de suite la couleur : notre héros sans passé ne semble pas prêt de recoller les morceaux de sa vie ! Accrochez-vous, car chaque nouveau fragment d'information complexifie le problème au lieu de le résoudre. Poldarn semble avoir des liens avec chacun des camps qui guerroient à travers l'empire, être impliqué dans tous les complots qui l'agitent. Il a beau essayer de se convaincre qu'il ne veut pas savoir, son passé revient sans cesse le hanter.

Sur les traces de ce personnage ambigu mais attachant, nous découvrons un monde moyenâgeux qui ressemble beaucoup au nôtre, suffisamment consistant pour qu'on se l'imagine aisément, mais qui se laisse oublier au profit des pérégrinations des personnages. Une poignée de personnages principaux plutôt intéressants d'ailleurs, qui se croisent et se recroisent à loisir au fil des pages et des événements, qui ne laissent que peu de temps mort.

Les lecteurs de La trilogie Loredan retrouveront le style fluide et précis de l'auteure, dans une histoire qui, pour complexe qu'elle soit, reste cependant plus facile à appréhender. La fin apporte quelques clés, mais le lecteur inassouvi devra attendre les tomes suivants de Le Charognard pour connaître le fin mot de l'histoire !