Bestioles
		Hubert & Ohm Edition : Dargaud 2010, 72 pages ISBN : 978-2-205-06147-5 19 €

Nous sommes dans un monde un peu particulier, où la civilisation est purement et simplement séparée de la sauvage nature par des règles très strictes : il est interdit de se rendre dans la forêt où pullulent de petites bestioles, afin de ne pas les déranger le moins du monde. Cependant, quelques camps d'extraction de minerais ont été construits ici ou là, et il est important de faire de temps à autre un voyage aérien de la forêt afin de refaire le ravitaillement des ouvriers. Cette fois, au grand dam du capitaine habituel, un être misogyne et pour le moins alcoolique notoire, c'est une Luanne, une fille, qui sera chargée d'être le copilote. Le duo sera accompagné de Childéric, un petit garçon timide et maigrelet dont le richissime père a joué de ses relations pour lui permettre de faire ce voyage…

Le voyage en dirigeable démarre donc. Immédiatement, Luanne a fort à faire pour faire comprendre au capitaine qu'elle n'est nullement intéressée. Ce dernier noie son chagrin dans le whisky, et finit par faire une fausse manoeuvre en s'endormant aux commandes de l'appareil : c'est le crash en pleine forêt… Dans un premier temps, toutes sortes de bestioles viennent voir les intrus par curiosité, mais le capitaine à peine dessaoulé tire dans le tas et déchaîne l'hostilité de toute la forêt…

Car voilà le secret terrible : toutes les bestioles de la forêt sont reliées les unes aux autres dans une espèce d'âme commune, si bien qu'il est très facile de se faire rapidement détester… Un autre fait étrange est que ces petites bêtes réagissent de manière plutôt surprenante à l'alcool, en libérant une espèce d'esprit qui cherchera immédiatement à prendre le contrôle de quelqu'un d’autre… Et le capitaine saoul à l’air d'un hôte tout trouvé, non ?

Bestioles est un titre pour le moins surprenant : cette histoire se propose ainsi de montrer les évènements à la fois selon le regard humain (ou presque !) et sous le regard d'une petite bestiole de la forêt. Ainsi, tout au long de la BD, la dernière bande de chaque planche est consacrée à des petites bêtes qui ressemblent à s'y méprendre à un chat. Outre ce fait surprenant, il faut bien reconnaître que la lecture de ce one-shot est tout à fait rafraîchissante, prenante et rythmée. Le scénario de Hubert (qui signe également les couleurs) fait ainsi forcément la part belle à l'écologie, certes, mais le tout est traité avec brio et intelligence.

Ainsi, on pourrait penser que ces bestioles sont toutes mignonnes, mais pas vraiment : il faut bien reconnaître qu'à la place des héros, on aurait vite une furieuse envie de tirer également dans le tas. Le tout est servi par le dessin très enfantin de Ohm. Ce dernier permet une grande lisibilité, et n'a pas grand-chose à envier à certains mangas.

Bestioles est donc une agréable surprise, dont la lecture conviendra aussi bien aux jeunes lecteurs qu'aux plus grands, et c'est là une grande qualité pour une série du genre.