La Maison des Rencontres
		Amis, Martin Edition : Folio 2009, 294 pages ISBN : 978-2-07-034167-2 6,50 €

Le narrateur sait mieux que personne que son frère Lev, intelligent et sensible n'est pas fait pour survivre au camp de Norlag. Et d'une certaine façon ça l'arrangerait bien que Lev disparaisse, lui qu'aime cette Zoya dont il est, lui aussi, désespérément amoureux.

Les deux frères survivront, le goulag fermera, et c'est seulement après être retourné, plus de quarante ans plus tard, sur le site de la baraque disparu où les épouses avaient le droit de visiter leur mari emprisonné, que le narrateur lira la lettre de son frère, mort entre-temps. Il saura ainsi, enfin, ce qui s'est passé à la Maison des Rencontres, pendant les deux jours que Lev et Zoya y avaient passé seuls, et dont Lev était revenu étrangement transformé.

Ce roman terriblement réaliste rend sensible au lecteur l'effet de la vie au goulag, avec ses hiérarchies absurdes et incontournables, ses spectacles horribles et sa perversité fondamentale. Cette histoire où il n'y a pas d'innocent - sauf peut-être Artem, qui ne survit pas - est racontée dans un style discrètement habile. Comme tous les personnages principaux, le lecteur s'obsède pendant tout le roman sur ce qui s'est passé à la Maison des Rencontres, point focal du roman et obstacle sur lequel bute le narrateur. Il est difficile de sortir indemne de cette plongée dans la "croix russe". La difficulté d'en parler tient au fait que l'auteur y décrit les conséquences les plus intimes du goulag, qui touche à l'être même de la personne, et à son sens des priorités vitales.