Primal Zone (Tome 1)
		Gabrion Edition : Delcourt, Collection : Hors Collection 2009, 100 pages ISBN : 978-2-7560-1691-7 12,90 €

Nous sommes dans l'appartement d'un homme âgé, malade, qui se sait condamné. Il a payé pour en finir le plus vite possible, et sans douleur. Alors, le Varan, un colosse impassible, est là et il honore son contrat. L'homme est plutôt mystérieux et plein de discrétion. Ses contrats lui sont fournis par un intermédiaire, qui l'aiguille sur sa prochaine victime, un artiste passé du nom de Jorge Eish. Lui, il est devenu complètement cinglé, dans son hôtel pourri envahi par les rats... L'occasion rêvé pour le Varan de laisser s'exprimer son alter-ego, une bête primaire du nom d'Ortog.

Car Ortog est bien un alter-ego, même si les images ne le montrent pas clairement : c'est la bête sauvage que le Varan a en lui, et qu'il faut laisser sortir de temps à autres. Là, non content de dévorer quelques rats, il y a aussi deux clochards qui y passent, en plus de Jorge Eish, qui en vient à se suicider devant tant d'horreur et de désespoir... Il est temps à présent pour le Varan d'aller prendre quelques jours au soleil, pour ne pas dire en plein désert. Un endroit démoniaque où Ortog va pouvoir de nouveau être libre... Un endroit où, malheureusement, l'image de Jorge Eish va continuer à hanter le Varan...

Pierre-Yves Gabrion est un auteur bien de chez nous, puisqu'il enseigne la narration graphique à Bordeaux. C'est par le biais de Delcourt que nous parvient sa dernière production. Inutile de préciser que l'histoire est noire, sombre, carrément glauque par moments, nombreux au demeurant. Cette noirceur scénaristique est parfaitement agrémentée par des dessins en noir et blanc : quoi de mieux que la noirceur de l'encre dans ce genre d'exercice graphique ?

Mais Primal Zone n'est pas qu'un livre mettant en scène la violence la plus gratuite. C'est bien de schizophrénie dont il est question ici, certes dans ses formes les plus extrêmes. Sachez tout de même que Jorge Eish n'est pas qu'une invention de l'auteur : ce'st un artiste peintre ayant réellement existé, schizophrénique, et qui s'est donné la mort en 1998. Jorge Eish était également un ami de Gabrion, d'où la maîtrise scénaristique que l'on ressent lorsqu'un auteur (de BD ou autre) sait de quoi il parle.

Le livre n'aura pas de mal à plaire à un public en mal de sensations fortes, et propose un scénario complexe, nécessitant tout de même une bonne attention dans la lecture. De quoi passer un bon moment donc, avant la sortie du tome 2.