À l'orée sombre
		Ebory, Élisabeth Edition : Griffe d'Encre, Collection : Recueil 2009, 252 pages ISBN : 978-2-917718-07-0 16 €

Notre enfance nous a beaucoup apporté en terme de contes et légendes diverses. En effet, l'on pouvait aisément s'identifier au preux chevalier qui allait défier un dragon, ou encore à l'aventurière et ses compagnons qui explorait une île aussi familière qu'inconnue... ou encore ce magicien capable de traverser le labyrinthe de la mort et ses multiples pièges. Et pourtant, maintenant, à l'âge adulte, nous savons que tout ceci est le fruit de diverses imaginations. Ou pas.

Dans ce recueil, Élisabeth Ebory décide de nous emmener vers ces contrées qui nous ont été familières, mais que l'on a souvent oublié. Et elles ne sont pas si loin de nous. En effet, Cela peut être juste dehors, dans le parc comme dans Quand il neige, ou encore au cours d'une Nuit d'été, ou peut-être même juste dans le miroir qui nous fait face, comme dans Cendre / Alexeï. Le voyage dure le temps d'une sonate, que l'auteur nous interprète selon trois mouvements ponctués d'entractes nommés oniriquement Âme.

Dans cette première mélodie, la parole est donnée à ceux qui fuient. Fuir quoi ? La réalité bien sûr. Aussi Frand se plonge dans son livre dans Quand il neige, et ce pauvre hère trouve un flyer vantant Les Chants de chaudrons. Ou encore celle qui veut se venger et venger sa mère dans Burning. Mais bien sûr, le départ dans cette vie aux marges du réel a un coût. Et parfois, il est lourd à payer. La première Âme, A l'assaut, ne diffère pas tant que ça de ce mouvement.

Il s'en suit la deuxième mélodie, la plus longue aussi, dévoilant les noirceurs de la forêt. Ne sommes-nous pas À l'orée sombre ? C'est ainsi qu'un garçon attend le bon vouloir de la reine des fées dans Our Paradise. Celle-ci saura comment tester sa détermination, mais pour quelle résultat ? Ailleurs, un étudiant rêve chaque nuit d'une autre partie du globe, la Sibérie. Et il en écrit les grandes lignes, comme si quelque chose l'y reliait. Au loin, un train amène une famille de musiciens dans une étrange ville nommée April. Sous son aspect banal, les choses s'y passent pourtant de façon fort différentes. L'été, une femme attend son amant la nuit. Viendra-t-il ? Cet autre garçon a bien moins de chance, obligé de parcourir les rues sombres de la ville en attendant un client éventuel. Pourquoi ne fuit-il pas ? La deuxième Âme raconte l'histoire d'une fille qui attend sa mort... en l'imaginant.

Après tant de noirceur, reste-t-il de l'espoir ? Le mouvement final, justement nommé Légère musique de pluie, ne pourra que durcir ces sombres contrées. Cendre et Alexeï sont liés d'une façon ou d'une autre. Et il est bien difficile aux enquêteurs de savoir exactement pourquoi. Les membres des groupes de rock aussi ont le droit de rêver. Ainsi ce groupe, qui a eu naguère son heure de gloire, se voit invité dans un autre pays pour une représentation unique, celle en l'honneur de la reine des elfes. Car ce pays n'est autre que Faérie, mais le groupe - et son étrange unique fan - l'ignore. Dans le monde, il y a aussi ceux qui chassent les graines de magies. Le peuple doit en effet ignorer son existence, et les chasseurs d'empêcher quiconque d'en profiter.

Comme vous avez pu le remarquer, ces contes sont variés, et dévoilent un message relativement unique dans l'esprit d'Élisabeth Ebory. Pourtant, j'avoue sans vergogne avoir eu beaucoup de mal à m'y plonger complètement. Peut-être parce que le style était très riche, et m'empêchait d'imaginer une partie par moi-même. Ou encore parce que mis à part Un soir, comme on embrasse, l'ensemble est très noir, sans véritable espoir d'amélioration. Il est vrai que je suis encore très naïf, et que j'aime m'identifier à des personnages. Ici, c'est rarement possible.

N'allez cependant pas croire que l'ensemble manque de qualités ! Les nouvelles sont fort bien construites, l'illustration d'Amandine Labarre n'est pas en reste, et la maquette de Griffe d'Encre est comme à son habitude irréprochable. Mais c'est juste que je n'ai pas su me plonger dans cet univers. Et vous, avez-vous gardé votre âme d'enfant ?