Ikigami, préavis de mort (Tome 1)
		Mase, Motorô Edition : Asuka, Collection : Seinen 2009, 213 pages ISBN : 978-2-84965-537-5 7,95 €

Au Japon prévaut une loi pour la sauvegarde de la prospérité nationale. Comme son nom l'indique, elle a été créée pour pérenniser la prospérité de la nation, et ce par le moral de la population. Pourtant la réalisation et son résultat semble plutôt inverse. À l'entrée à l'école primaire, chaque enfant se voit vacciné. À l'âge adulte, certains en mourront. Qui ? Personne ne peut le savoir... avant la veille de son décès et la réception d'un préavis de mort surnommé l'Ikigami. Aux jeunes de découvrir la vraie valeur de la vie, sachant que certains, 0,1 %, ne pourront pas la vivre. Fujimoto est maintenant un adulte... et il est chargé dans son rôle de fonctionnaire de délivrer les Ikigami remis par le ministère de la santé et de la protection sociale. Que décideront de faire les futurs détenteurs de l'Ikigami pour ses dernières vingt-quatre heures de vie ?

Autant le dire tout de suite avec un vilain jeu de mot, cette série est une véritable tuerie ! Le côté fantastique, uchronique, en réalité n'est pas du tout détaillé. Seules les mentalités humaines sont ici mises en valeur par Motorô Mase. Et pourtant, la vie dans une société qui exige un tel sacrifice humain et moral paraît à proprement impossible, un véritable appel à la révolution. Il s'agit ici d'une véritable dénonciation d'un système déshumanisé réglé au millimètre par des fonctionnaires qui ont perdu tout sentiments personnels. Bref, le nôtre, les morts en moins. Comme l'explique Josselin Moneyron dans son article en fin de volume, cette série aurait très bien pu être censurée dans un pays moins démocratique. C'est peut-être justement l'absence de moralisation (à part quelques pages au début) qui font de Ikigami une oeuvre qui bouleverse tant le lecteur.

Les personnages, receveurs de l'Ikigami ou leurs familles, ont bien des réactions différentes. La gloire de la nation n'en fait généralement pas partie. L'un voudra se venger des humiliations reçues, un véritable fléau des établissements scolaires japonais déjà décrits dans des séries comme l'excellent Life de Keiko Suenobu. L'autre voudra vivre son rêve et renouer avec celui qu'il a blessé naguère. Toutes ces vies anonymes sont décrites avec tant d'importances par Mase que l'on peut comprendre que c'est un peuple qui fait une société. Alors la suite de la série nous dévoilera sans doute d'autres facettes méconnues. En tout cas ce manga atypique des éditions Asuka mérite sans problème une lecture approfondie.