Sous Les Collines Voûtées
		Russell, Sean Edition : L'Atalante, Collection : La Dentelle du Cygne 2008, 537 pages ISBN : 978-2-84172-414-7 23 €

Le jeune Samual Hayes se vit fort dépourvu lorsque sa famille se retrouva sans le sou. Contraint de vivre dans un coin beaucoup moins huppé que ce dont il a l'habitude de jouir, le voilà logé rue du Paradis, sorte de zone frontalière avant la bascule dans la véritable pauvreté. Un soir, alors qu'il rentre chez lui en méditant sur sa disgrâce, quelques résidents de son quartier lui déconseillent de gagner son domicile car celui-ci est fouillé par les gens de la marine. Samual décide de prendre ses jambes à son cou et le voilà en fuite à travers les rues, poursuivi par des personnes plutôt hostiles. Son salut viendra d'un carrosse providentiel, d'un lupanar et de la rencontre fortuite avec son ami, l'empiriste Erasmus Flattery, dans ce lieu de débauche.

Sean Russell poursuit son exploration de la Farreterre en contant, cette fois, l'histoire de l'ancêtre de Tristam Flattery, le célèbre Erasmus Flattery. On assiste à la genèse de l'histoire de la foliée royale et son avènement au grand jour car ce récit se déroule quarante ans avant les aventures narrées dans Un Monde sans Fin et Une Mer sans Rivage. Il est donc très intéressant de vivre à rebours les aventures des héros mentionnés dans les ouvrages précédemment cités. Présentement, l'acteur principal de Sous Les Collines Voûtées est le ténébreux et inquiétant Lord Eldrich. Il en est le coeur, le point de ralliement, celui qui tire toutes les ficelles dans l'ombre. Il en est aussi le vecteur magique puisqu'il est le dernier représentant de la race des mages et par-là même détenteur d'un savoir essentiel dont plusieurs personnes aimeraient s'emparer. On retrouve néanmoins dans cette oeuvre la trace de protagonistes familiers comme le peintre Averil Kent et la comtesse de Shilton. Cette dernière bénéficie de cette aura très particulière qui jette la plupart des hommes dans des tourments amoureux et les font agir de manière insensée et incontrôlée. Il est on ne peut plus étrange de voir ces érudits ou autres artistes, tous considérés comme des hommes intelligents, se comporter de façon inexplicable, irraisonnée. C'est dans ce roman que l'on assiste à la naissance de l'attachement du peintre pour la comtesse, attachement qui le pousse à commettre des actes dont il ne mesure pas toujours la portée. Seul le mystérieux Lord Skye présente une farouche résistance au charme d'Elaural. Il s'agit d'un personnage insaisissable qui poursuit ses propres objectifs, un grand esprit qu'on a du mal à cerner.

Á l'instar du diptyque initial, c'est la quête du savoir et la curiosité humaine qui est à l'origine du désastre annoncé. Des personnes, à l'image des disciples de Teller, organisation secrète représentée par Anna Fielding, ne peuvent supporter la disparition des arts alors que d'autres comme Kehler ne peuvent seulement envisager qu'on puisse leur dissimuler des informations ou leur interdire l'accès à certains pans de l'histoire, même si cela procède de la préservation de la race humaine. On replonge avec délice dans cette atmosphère surannée, ce style précis et ce langage soutenu bien que l'ambiance paraisse ici plus noire, plus sombre probablement à cause de la présence du mage, du périple souterrain que vont connaître Hayes et ses acolytes  lors de la visite des grottes et de la fatalité qui pèse sur le groupe d'explorateurs. C'est vraiment un plaisir que de partir à l'aventure en telle compagnie, que ce soit pour un premier ou un second voyage.