Les chevaux du vent (Tome 1)
		Fournier & Lax Edition : Dupuis, Collection : Aire Libre 2008, 64 pages ISBN : 978-2-8001-4111-4 18 €

Nous sommes en Juin 1850, dans l'Himalaya indien, sur les bords du Gange. Un petit garçon muet nommé Kazi est malmené par d'autres enfants du village qui le jettent à l'eau. L'enfant est à deux doigts d'y passer, ce qui est fort insupportable pour son père, Calay, qui se heurte en plus à la passivité de ses deux autres fils aînés, Basanta et Resham, qui sont pour le fait que Kazi parte pour devenir moine, dans la cité de Garphu. La décision est lourde de conséquences, car cela signifierait pour les parents le fait de ne plus voir leur fils pendant des décennies, peut-être même plus jamais.

Mais ce sort semble finalement être le meilleur pour le petit Kazi, surtout dans une famille certes aimante mais très pauvre, où une bouche supplémentaire à nourrir représente un lourd fardeau...

Quinze années ont passé, et les parents n'ont pas encore revu Kazi. Les frères aînés ont bien grandi et ils choisissent de prendre Mina comme épouse, dans ces régions où c'est la polyandrie qui est de mise (l'inverse de la polygamie). Dans ces conditions, il est difficile pour les deux grands frères de ne pas vite se retrouver rivaux, au grand désespoir de leurs parents, surtout quand Mina privilégie Resham, qui est pourtant plus jeune que Basanta...

La situation devient vraiment insupportable pour Calay qui, en secret, souffre de l'absence de son fils cadet. Cela est très dangereux dans ces montagnes sans cesse parcourues par les anglais, mais le vieil Himalayen ne peut plus refuser l'évidence : il va devoir partir à la recherche de son fils, afin de voir enfin ce quil est advenu de lui. Mais pour cela, une seule solution : entrer au service de l'armée anglaise qui, à l'époque, a besoin de marcheurs solides histoire d'en faire des cartographes de la montagne, dans un lieu qui n'est encore répertorié sur aucune carte...

Calay a certes l'impression de trahir ses origines en favorisant la connaissance anglaise de son territoire ancestral, mais il ne peut décidément plus faire autrement. Seulement, il ne faudra pas qu'il soit surpris par les siens, qui voient d'un très mauvais oeil les traîtres à la solde anglaise.

Voilà un premier tome qui nous fait voyager ! Au travers des dessins montagnards, Fournier réussit à nous faire penser au film Himalaya sorti il y a quelques années déjà. L'homme s'est magnifiquement empreint de ces paysages majestueux, où les rigueurs climatiques peuvent vite se révéler impitoyables. Le scénario de Lax est fort émouvant : on y accompagne ce père, Calay, qui est le personnage principal, tiraillé entre ses ancêtres et sa terre, et l'amour qu'il porte à son fils le plus faible.

Un très beau livre, très humain, dont on pourra même admirer une partie de la genèse en feuilletant l'édition spéciale limitée pour les 20 ans de la collection Aire Libre : les esquisses qu'on y trouve (surtout sur les expressions des autochtones) y sont de toute beauté et dénotent du nombre d'heures qu'il aura fallu aux auteurs pour atteindre ce résultat.