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Au miroir des Sphinx

 
  Bousquet, Charlotte
Edition : Argemmios, Collection : Recueil 2008, 211 pages ISBN : 978-2-9530239-1-6 14
 

Le sphinx évoque toujours en nous la statue gigantesque qui garde le passage vers les grandes pyramides de Gizeh. Mais c'est aussi une créature mythologique que l'on retrouve autant chez les égyptiens que chez les grecs. Sa signification en elle-même démontre le mystère qu'il apporte. Gardien du monde souterrain chez les Egyptiens, maître des énigmes chez les Hélènes, son existence a toujours donné l'inspiration aux artistes en tout genre. Notre époque moderne n'y fait pas exception. Ici, Charlotte Bousquet relate dans ce recueil non pas des nouvelles sur les sphinx en tant que tels, mais plutôt sur l'idée qu'ils transportent à travers le temps.

En dix nouvelles, en vers ou en prose, plus quatre pages inspirées d'oeuvres existantes, l'auteur traverse le temps de l'antiquité vers le Moyen Âge, puis notre époque contemporaine. Si les nouvelles décrivent des événements distincts, elles sont liées par une recherche de soi chez leurs personnages principaux. Ainsi en guise de prologue, le philosophe égyptien Arius veut prouver que chaque homme peut-être un dieu. Il rencontrera la Sphinge des énigmes au moment de la mort. Suit la première partie se déroulant dans l'antiquité. Trinité est une légende égyptienne où trois soeurs fort différentes qui vont accueillir deux frères étrangers. Un drame passionnant qui verra les désirs enfuis de chacun se révéler. Dans La jeune fille et la Sphinge, Charlotte Bousquet revisite le mythe d'Oedipe, en ajoutant le personnage de Séléné, qui se liera d'amitié avec la Sphinge d'Apollon. Ce dernier se montrera fort curieux et provoque des événements aux conséquences inattendues. Dernière de cette partie, le poème Les proscrits évoque le devenir d'un être entre les mains des dieux.

En second lieu, le Moyen Âge. Dans Vies volées, Lucrezia invoque l'archange Uriel, mais c'est un tout autre qui répond à son appel. Sa peur et sa haine lui font oublier de connaitre ses propres désirs et limites. On retrouve dans cette nouvelle un thème assez fréquent chez l'auteur, celui des vampires. De façon similaire, Julien est recueilli par une dame fort étrange, Luna de Lobierac, dans la région proche de Toulouse. Si elle lui a sauvé la vie, lui-même est en proie à l'indécision face à ses sentiments, la raison et le désir. Je dois avouer avoir été particulièrement touché par ce récit, Les confessions d'un parjure. Le poème terminant cette deuxième partie, Amours anciennes, est un sonnet évoquant deux amants morts.

La dernière partie, plus actuelle, débute par l'errance d'un soldat de la marine, seul rescapé d'un naufrage, qui échoue sur l'île de Calipso. Tel Ulysse - à qui il emprunte son nom - il décide de faire croire en son amour tout en cherchant à s'enfuir. Encore une fois, cette nouvelle - Le dernier Ulysse - m'a beaucoup touché, par cette approche de mythique et de moderne à la fois, sans oublier cette réflexion sur ce qu'est l'amour. La dernière nouvelle se déroule de nos jours en plein Paris. Là, dans Borderline, une artiste de cirque a passé un pacte pour être la meilleure, mais elle y perd son goût de vivre. Est-ce que le show must go on comme disait le groupe Queen, que l'auteur nomme en référence ? Le dernier poème, Ça, terminant ainsi le recueil n'en donne pas la réponse, mais parle encore d'un sujet récurent dans les récits. Notez que certaines nouvelles ne sont pas inédites, mais que celles déjà publiées se sont vues revues, corrigées et leur contenu enrichi.

Ce qui est certain, c'est que la lecture de ce recueil ne peut pas laisser indifférent. Déjà parce qu'on ne peut qu'admirer sa structure. Les textes s'y harmonisent de façon logique, presque attendus. Ensuite parce que leur contenu semble à la fois familier, et inédit. Je dois avouer n'avoir jamais vraiment ressenti ces deux sentiments ensemble. Et si je n'adhère pas complètement à tous les thèmes proposés, chacun a été lu avec une facilité déconcertante et avec grande attention. Et je suis à peu près persuadé qu'en relisant le recueil, j'y découvrirais encore beaucoup de messages de leur auteur. Aussi je ne puis que vous conseiller de lire ce premier recueil des éditions Argemmios qui, comme leur premier roman Les débris du chaudron, savent choisir des textes forts mêlant nos aspirations et la mythologie. Je ne puis que les féliciter en cela.

Ecrite par Garion, le 29 Octobre 2008 à 15:10 dans la rubrique Roman Nouvelle .
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