Le Cercle des Myosotis
		Bouchard, Nicolas Edition : Mango, Collection : Royaumes perdus 2007, 186 pages ISBN : 978-2-7404-2204-5 9 €

Laurentine est la fille du poète Pétrarque et de l'élue de son coeur, la belle Dame Laure. Ce dernier a confié son éducation au centaure Chiron qui évolue dans un monde souterrain en compagnie d'autres créatures comme les faunes, les nymphes et même les dieux. Une ombre vient cependant noircir le tableau : tous ces animaux fabuleux perdent leur statut divin en recouvrant leur forme bestiale originelle. Les satyres redeviennent boucs, les centaures chevaux et les hamadryades se métamorphosent en arbres. Cela est du à la perte de contact avec la lumière puisque tous ces êtres existent dans l'obscurité et la déchéance est la conséquence directe de ce mode de vie. L'héroïne décide de ne pas abandonner ses amis et son univers, aussi lorsqu'elle entend parler du Cercle des Myosotis, elle n'a de cesse de partir affronter seule les lourdes épreuves qui l'attendent pour restituer leur vraie nature aux habitants de la cavité.

Ce récit met en scène la très jolie Laurentine, brune de cheveux mais possédant la beauté de sa mère, qui va partir à la conquête de la Grande Lumière afin de sauver ses compagnons et son monde. Elle a comme professeur le très sage centaure Chiron qui a été choisi par Pétrarque lui-même. La responsabilité que lui confère ce statut le force à sortir de sa réserve et à affronter les hommes pour veiller sur la vie de sa pupille. La jeune fille côtoie au quotidien le faune Arétho qui a la particularité d'oublier chaque matin ce qui lui est arrivé la veille. Il ne se souvient que d'une seule chose : son amour pour Laurentine. On trouve également dans son sillage la nymphe guérisseuse Louloudi, fille du dieu Apollon, qui prend en charge la douleur d'autrui avant de le remettre sur pieds.

Nicolas Bouchard mêle sans complexe les panthéons grecs et romains pour écrire cette oeuvre on ne peut plus romantique dont le centre devient les amours de Laurentine et de son chevalier Anselme de Drachenfels. L'histoire a tendance à occuper une large place dans le roman, au point qu'elle éclipse un moment le véritable sujet du livre à savoir la quête du Cercle des Myosotis, censé apporter la lumière et délivrer de la régression les créatures légendaires. On retrouve ici l'idée des épreuves tout comme dans son autre livre Les Enfants de Dana, sauf que là il ne s'agit plus de tester les pouvoirs magiques mais la beauté et la pureté intérieures, une sorte de grand test de personnalité à la sauce médiévale. Ce sont les qualités intrinsèques de l'héroïne qui vont lui permettre de triompher ou non des pièges qui seront tendus sur sa route. Il n'est pas inutile de rappeler à quel point la lecture d'un ouvrage de cet auteur peut être agréable, surtout en ce qui concerne cette fable fraîche et pleine d'allant. On suit ses personnages avec joie et on se laisse embarquer dans leurs aventures rocambolesques et fantastiques sur fond de contexte historique trouble, à savoir l'époque du Grand Schisme de la chrétienté, ce qui implique un climat lourd de menaces empreint de superstition et de lutte de pouvoir dans l'environnement humain. En élargissant le contexte religieux, cela montre également le sort subi par les croyances polythéistes lors de l'avènement du Dieu unique parce que ces divinités, qui ont été adorées et célébrées, n'ont plus droit qu'à la méfiance, la peur et enfin la punition. Il suffit pour s'en convaincre de suivre le sort qui est réservé à Louloudi tout au long du récit. C'est dans cette atmosphère pesante que se révèle la vraie nature de la Lumière. Instructive et distrayante, que demander de plus à une oeuvre destinée au jeune public, même si la récupération de son intrigue principale tient du numéro d'équilibriste.