La Légion Ecarlate
		Heliot, Johan Edition : Mango, Collection : Royaumes Perdus 2007, 172 pages ISBN : 978-2-7404-2333-2 9 €

Servius Tarsa ne se doute pas de ce qui l'attend lorsqu'il demande à l'empereur Trajan d'autoriser une expédition pour conquérir de nouveaux territoires dans le but d'enrichir l'empire romain. Quand sa flotte est prise dans une tempête dont elle sortira affaiblie, il décide d'ignorer ce signe divin et de persister dans son périple. Lorsque au bout d'une traversée harassante, la vigie annonce la présence d'une terre à l'horizon, tout l'équipage croit entendre sonner la fin de leurs tourments alors que ce n'est que le début d'une longue suite de grandes déconvenues et de drames sanglants. Le commandant de la troupe entraîne dans son sillage Marcus, une jeune recrue originaire d'Ibérie ainsi que son compagnon Octavius.

Ce roman conte les aventures de Marcus Livius Salveris, soldat de la légion romaine sous les ordres de Servius Tarsa, un légat avide de gloire et de conquête. Á bord de cette galère on se trouve également face à Decimus, capitaine et donc supérieur direct de Marcus ainsi qu'à l'infâme Borsa, son second que l'adolescent va réussir à se mettre à dos. Il va s'en faire un farouche ennemi qui le poursuivra de sa morgue tout au long du récit. Il a pour frère de misère Octavius, rebaptisé Ursus par l'ensemble de la légion à cause de sa pilosité débordante. Ce livre se divise en deux volets, le second étant plutôt axé sur la vie au sein de la tribu des Oceti Sakowin Oyate et voit apparaître des personnages comme Win-Jun qui va recueillir Marcus au sein de son clan, son épouse Me-Kuh-Ta et le guérisseur See-Non-Ka. Ces deux parties sont assez inégales au niveau de l'intérêt pur car la première est alourdie par les explications certes nécessaires et pédagogiques sur la vie d'un soldat et sur l'histoire de Rome mais qui ont tendance à s'étaler au détriment du récit. Il faut bien sûr resituer les choses dans leur contexte, néanmoins on se trouve davantage dans le registre de la description et cela ralentit le rythme de la narration.

Comme tout roman d'apprentissage qui se respecte, cette histoire raconte une fois de plus l'accession au statut d'adulte, par le biais de l'acquisition du libre arbitre mais aussi par le passage de lourdes épreuves de résistance et de chasse qui permettent de quitter le monde de l'enfance. Elle décrit également la différence de mode de vie entre les romains soit disant civilisés mais sans humanité et les peaux rouges chez qui atterrit Marcus qui ont une vie simple, à l'écoute de la terre et de la nature ainsi que des forces divines. Johan Heliot établit un parallèle entre les conquérants débarquant en terre inconnue et considérant d'emblée les habitants comme des sauvages, alors qu'on leur procure un accueil amical et sans préjugés, sans envisager le fait qu'ils puissent se métamorphoser en meurtriers et en envahisseurs. Ce livre est intéressant à plusieurs niveaux, tout d'abord grâce à la plume de l'auteur car, cela va sans dire, ce dernier est doué pour raconter des histoires, ensuite à cause du message qu'il véhicule, apprendre à reconnaître les valeurs sur lesquelles on a envie de fonder son existence et agir en fonction de ses convictions propres. Enfin de par la vision paisible de la vie en communauté telle que la conçoivent ces tribus. On ne peut pas dire que ce soit la meilleure oeuvre de cet auteur prolixe qui compte dans le paysage de la littérature de l'imaginaire française ; cela étant, ce roman reste un voyage intellectuellement formateur à effectuer bien que la scène de massacre d'une tribu puisse être difficilement supportable pour le jeune public.