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Kirino, Natsuo Edition : Points, Collection : Thriller
2007, 672 pages
ISBN : 978-2-7578-0481-0
8,50 € |
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Elles sont quatre à travailler dans l'équipe de nuit d'une fabrique de panier-repas. Elles ne sont pas spécialement amies en dehors de leur emploi cependant elles aiment faire équipe parce qu'elles savent pouvoir compter les unes sur les autres face au redoutable contremaître. Á l'extérieur de l'usine, elles ont toutes des vies difficiles et peu passionnantes. Ce qui va déclencher la réaction en chaîne est l'attitude de Yayoi : un soir, dans sa distraction, elle bouscule et renverse le bac de sauce dont elle a la responsabilité. Lorsque ses collègues s'enquièrent de son état elle finit par avouer que son mari l'a violemment frappée au ventre. Ce geste intolérable aux yeux d'une épouse plutôt docile et soumise va la décider à passer à l'acte de façon subite et définitive. Ce roman met en scène quatre femmes très différentes dont le seul point commun est de connaître des difficultés affectives et financières. Kuniko, la plus jeune d'entre elles est écervelée, envieuse et futile. Elle s'est endettée jusqu'au cou à cause de ses dépenses insensées. Dépassée par son désir inextinguible de luxe, elle passe son temps à courir après l'argent afin de rembourser ses crédits. Masako, quant à elle, est une étrangère au sein de son propre foyer puisqu'elle ne vit plus sur le même rythme que son mari et son fils. Elle est la plus dure du groupe ce qui lui permet de très vite prendre en charge les problèmes liés à la disparition du corps et représenter la figure de l'autorité aux yeux des autres. Le récit se focalise progressivement sur elle et sa complexité la rend d'autant plus intéressante. Yayoi la plus jolie et la plus discrète au départ, a deux enfants en bas âge. Elle est un brin naïve et va se faire un véritable plaisir de laisser Masako s'occuper des dommages collatéraux liés à son crime, au point parfois d'oublier que c'est elle l'assassin. Enfin il y a Yoshié, certainement celle dont la vie est la plus rude. Elle est veuve et doit s'occuper de sa belle-mère grabataire et de ses deux filles, toutes trois dotées d'un ego surdimensionné, problème auquel viennent s'ajouter ses difficultés financières. L'ambiance de ce livre est plutôt glauque, poisseuse surtout au plus fort des températures caniculaires de l'été japonais. Il décrit un aspect de la condition féminine et de la misère de certains foyers moyens. Le noeud de la guerre qui pousse ces femmes à agir de manière inhabituelle c'est l'argent. Elles sont toutes les quatre dans des situations précaires pour des raisons diverses, leur quotidien est difficile, encore aggravé par le fait de devoir travailler de nuit, sans aucun soutien affectif. Il est vrai que c'est plutôt un roman aride, abrupte et assez cru dans ses propos, sans dissimulation ni voile pour atténuer la dureté des faits et des paroles. Il s'agit également d'une plongée dans les esprits troubles de simples êtres humains dont une seule action devient le générateur, le révélateur de leurs réelles personnalités ainsi que la démonstration de la mise en place d'un engrenage duquel il est impossible de se dépêtrer, une sorte de spirale infernale dont aucune ne sortira indemne ou grandie. Parfois le traitement méthodique, clinique qui est appliqué à un sujet pour le moins atroce fait froid dans le dos. On se surprend à la page cent soixante à comptabiliser le nombre de sacs, à se dire que le total n'est pas cohérent, avant de se souvenir de ce dont il est question, et c'est peut-être cela le plus horrible dans l'histoire. Le lecteur opère la même mise à distance que les personnages dont les protestations sont très vite balayées par les réalités de leurs conditions de vie et tout cela s'apparente très vite à un travail, un service à effectuer en échange d'un salaire. On ne ressort pas intact de ce voyage dont le sexe, la violence et le sang ne sont pas les seuls éléments à générer un sentiment de dégoût. Ce qui fait frissonner c'est le décalage qui existe entre l'horreur du sujet et la banalité de ton qui est employé pour le retranscrire. Un roman à découvrir sans hésitation et dont les derniers chapitres sont magistraux.
Ecrite par , le 18 Septembre 2007 à 13:09 dans la rubrique .
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