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La femme piège (Trilogie Nikopol - Tome 2)

 
  Bilal
Edition : Casterman 2005, 56 pages ISBN : 2-203-35328-7 13,90
 

Alors que nous quittions le premier tome sur un sentiment mitigé, une intrigue somme toute tout à fait bouclée, Bilal offre six ans plus tard une suite aux tribulations de l'infortuné Nikopol, un nouvel opus aux accents nettement moins grandiloquent, nettement moins touffu, moins froid, plus renfermé, plus humain, plus lyrique en bref, un opus à ravir, un opus consommé.

Pour résumer l'histoire, La femme piège reprend les deux protagonistes du premier tome, Horus et Nikopol, toujours au sein du même univers déliquescent, et place au premier plan, en tant que figure principale, une journaliste à bout de souffle : Jill Bioskop. Le scénario court à deux voix, celle-là de Nikopol (toujours dans son asile et toujours en relation mentale avec Horus) et celle-là de Jill, lesquels vont en permanence alterner, pour se rejoindre au final. De fait, on quitte ici Paris, pour Berlin, où l'on attend impatiemment le retour d'une expédition spatiale de première importance ; seulement, à son bord s'est glissé un étrange importun : Horus.

Vous l'aurez compris sans doute, ici, point de véritable coup de théâtre, de rebondissements retors et sans nombres, aux portées majeures, l'album est déjà tout tendu, dès le début, vers la rencontre de la fin, et, au-delà, sur le tome ultime de la série : Froid équateur. L'intrigue est donc, en comparaison du premier album, largement épurée, ramenée à la sphère privée de deux personnages, à leurs aspirations, leurs désillusions, leurs travers C'est l'homme qui, dans cet album, tout simplement, provoque le destin, et non plus les dieux, qui l'entraîne étourdiment, dans un cercle inintelligible et sans rémission. Enfin se profile un thème qui fera la force du film et le charme du dernier album, un thème typiquement humain, relativement passionné : l'amour.

Aussi ne se soucie-t-on plus seulement de trépider au moyen d'un scénario ficelé, savamment agencé, mais nous contentons-nous de suivre hébété l'évolution des personnages, dans leurs sentiments, leurs émotions. Peut-être Bilal gagne-t-il à littéraliser l'album, et dans le sens figuré, en embrassant une optique que je dirais moins ludique et davantage organique, et dans le sens propre, en utilisant la voix off de Jill, son compte-rendu tapuscrit.

Car enfin, c'est avec le scénario, la masse textuelle qui s'en trouve élaguée. La forme du rapport écrit en dessous des cases, libère effectivement celles-ci de la surcharge quelquefois verbeuse des bulles ; la bande dessinée laisse place en la sorte à l'éclat graphique de Bilal, et rentre ainsi dans sa prérogative première, l'image dessinée ; à plaisir elle recouvre son propre langage, le langage de Bilal, aux tons contrastés, aux lignes parfois diffuses et vaporeuses, aux couleurs, qui se font suggestives, impressionnistes, et préfigurent en une certaine mesure la tétralogie du monstre...

Un second album en appelant un troisième donc, que l'on espère d'une aussi haute qualité.

Dici à là, sans réserve, on pourra ranger celui-ci parmi les chef-d'oeuvres...

Ecrite par Fulgore, le 21 Février 2007 à 13:02 dans la rubrique BD .
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