Au Pays
		Ben Jelloun, Tahar Edition : Folio 2010, 169 pages ISBN : 978-2-07-043794-8 5,10 €

Mohamed est à "lentraite"... Ou presque. A quelques mois de ce que chaque ouvrier attend habituellement avec impatience, il n'a pas du tout envie de quitter l'atelier qui a été son refuge depuis qu'il a quitté le bled. Son malaise est le temps qui passe, celui qui est passé. Son malaise c'est le temps qu'il va avoir... Pour penser... Il s'interroge, se souvient de ses amis, de ses camarades. Il pense à cet islam qu'il aime tant que de d'autres ont perverti. Il souffre de voir ses enfant s'éloigner de lui et de leurs racines. Cette retraite maudite est son plus grand malheur. Un matin, las de cette vie, il décide de retourner au pays, dans son bled... Dans sa vie. Il va construire une maison, la maison de sa famille, aussi grande que son coeur...

Tahar Ben Jelloun a dit dans L'auberge des pauvres : " Chaque personne est une armoire pleine d'histoires, il suffit d'ouvrir les tiroirs, c'est comme un chapelet qu'on égraine ". Voilà qui résume parfaitement Au Pays.

Je dois dire qu'au premier abord, j'ai été un peu déçue. Je trouvais ce roman un peu "larmoyant", et connaissant un peu l'auteur, ce constat me navrait. Puis je me suis interrogée sur la réalité de mon sentiment. Non, je n'étais pas déçue, j'étais génée. Je me sentais comme une voyeuse, observant sans vergogne la vie d'une homme que je ne connaissais pas, et que finallement personne ne connaissait, pas même sa famille. J'étais dérangée par cet immigré, jamais vraiment devenu français. Non pas dérangée par sa personne, Mohamed est en soit un personnage très attachant, mais dérangée par la mise à nue de ses sentiments, de ses croyances.

Au final, Tahar Ben Jelloun a encore visé juste, et on ressent nettement à travers cette oeuvre tout le passé de cet homme, et tout son amour pour son pays d'origine. Il parvient à présenter autre chose que ce que l'on voit ou entend chaque jour. Il nous présente sa réalité de l'islam, son respect des anciens. Il arrive par son écriture à nous faire traverser la Méditerranée, pour tenir le bras de Mohamed, et l'accompagner dans la folie de ces derniers jours, dans ce pays ou il n'est plus réellement chez lui...

C'est en fermant ce livre que j'ai pris conscience de son impact. Alors, n'hésitez pas, ouvrez le !