Ce qui se passa sur le pont Owl Creek
		Bierce, Ambrose Edition : Le Livre de Poche, Collection : Libretti 2004, 94 pages ISBN : 2-253-08782-3 1,50 €

La lecture commence et vous êtes immédiatemment plongé au beau milieu d'un champ de bataille. Champ de bataille, ou plutôt ce qu'il en reste.... le monde qui se dévoile sous vos yeux n'est qu'un amas de cadavres et de tuniques agonisantes. On le nomme "Bitter Bierce", "Bierce l'amer" et l'univers qu'il nous livre est teinté de sang et de cris. La mort y est omniprésente, levant sa grande faux et vous scrutant, avec ce sourire narquois... 
Chaque nouvelle se déroule durant la guerre de Sécession. Un conflit qui déchira l'auteur et le marqua à vie. A travers ses mots le lecteur s'emplit de haine contre la guerre et contre son inhumanité. Toutes les morts décrites apparaissent avec ironie et gravité en même temps. C'est une vraie satyre sur la guerre et les conflits humains. Ni plus ni moins, cruauté et guerre sont constamment associés. Les nouvelles se suivent et vous ne pouvez réfreiner ce sentiment de désespoir face à une humanité cruelle où les hommes ne cessent de s'entretuer inutilemment.

Dans Le coup de grâce, un capitaine doit choisir entre mettre fin aux souffrances de son ami où l'observer agoniser. La nouvelle suivante, Chickamauga, décrit la guerre à travers les yeux naïfs d'un jeune enfant, jouant avec un sabre en bois. La vision candide des atrocités peut sembler adoucir l'horreur de la guerre, mais Bierce le prouve : la guerre n'a qu'un seul visage, douloureux et impitoyable, et c'est plutôt la naïveté de cet enfent joyeux qui sera remise en question. Mais à quel prix ? La nouvelle qui suit Ce qui se passa sur le pont Owl Creek est admirablement orchestrée . Un véritable film, alliant surprises, flash backs et coups de canons qui resonnent encore dans mes oreilles. Je n'en décrirai pas plus car ce recueil de nouvelles fait parti des "must" à lire, et surtout qui ne nécessite pas un mois de lecture acharnée.

Voici donc quelques nouvelles assez courtes qui se dévorent sans appétit mais qui laisse sur vous une tâche indélébile. Vous  passez de surprises en angoisses. A certains passages, votre pouls augmente brutalement et vos yeux s'accélèrent, allant de mots en mots, de lignes en lignes.  De plus Ambrose Bierce provoque chez le lecteur une réflexion instantanée,  sur le comportement humain et sur la guerre. Reflexion qui ne fait pas de mal, surtout en ce moment  avec ce qui se passe dans le monde (notamment en Irak).