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La Femme-ciseaux et autres nouvelles

 
  Villar, Michel
Edition : Le Pied de Biche 2010, 94 pages ISBN : 978-2-919470-006 20
 

Ce recueil de nouvelles appelle la question suivante : qu'a voulu raconter l'auteur ? L'intrigue de sa première nouvelle, La femme-ciseaux, est originale, mais hélas, bien mal racontée et ce qui aurait pu devenir une histoire étrange et envoûtante dans le style d'Amélie Nothomb, devient une histoire peu crédible, dont les phrases lourdes et maladroites n'arrangent rien. En voici quelques exemples : "Ses traits fatigués auraient pu les envahir de compassion[...] empiler une nouvelle banalité[...] sans opposer la moindre résistance à la moiteur des lieux".

Cette nouvelle mériterait vraiment d'être retravaillée, allégée, car le postulat de base (l'art moderne fait passer n'importe quelle horreur pour une chose magnifique) est intéressant. La chute de cette nouvelle est d'ailleurs la plus belle trouvaille de l'auteur.

Les autres nouvelles n'ont hélas pas le même potentiel...

Soleil noir pour Lune blanche : joli titre. Mais ça s'arrête là. Personnellement, je n'ai absolument rien compris. L'histoire commence de façon banale, un homme prépare un repas d'anniversaire-surprise pour son frère. L'une des convives vient avec son hamster, dont elle ne se sépare jamais. La bestiole tourne dans sa roue et s'échappe de sa cage. Soudain, tout devient fou : le hamster est devenu une divinité géante, il y a des pièces supplémentaires dans l'appartement, tout le monde psalmodie "Enkor ! Enkor !", qui est le nom du Dieu-Hamster. Pourquoi ? Est-ce un rêve ? Le narrateur a-t-il consommé trop d'alcool et imaginé tout cela ? On n'en sait strictement rien. Et c'est ce que je reproche à Michel Villar. Il écrit ses propres délires mais ne donne aucune clé au lecteur pour décoder et comprendre un minimum.

Fleurettes : Concept séducteur au départ. Une femme écrit des mots d'amour à son amoureux, en 1754, puis en 1855, puis en 1956 ; cela devient des mails en 2008, puis des SMS de rupture en 2008. La progression du langage est à peu près respectée. Mais là encore, on ne comprend rien : quelle est l'histoire de chacune de ces femmes ? L'auteur a-t-il voulu décrire les différentes façons de l'évolution des relations entre un homme et une femme ou sont-ce des histoires différentes, racontées par des biais différents ? Il y avait certainement un sens à cette histoire, mais je n'ai pas trouvé lequel. Il est bien trop caché. C'est vraiment dommage car l'idée était bonne.

Souviens-toi : Ruiz travaille dans une agence d'assurance. Il est marié à Sandra. Tout va bien, c'est la routine, le quotidien. Il prend le bus, va au travail, rentre chez lui et retrouve sa femme. Mais un jour, sa femme en a assez de cette routine, elle s'ennuie. Il prend le bus, va à son travail, boit son café, et pense à elle. Elle n'est plus là. Comment savoir si elle est morte, si elle s'est suicidée, si elle est partie ? Encore une fois, je n'ai rien compris à l'histoire. L'auteur sait certainement ce qui s'est passé, mais il ne le dit pas à ses lecteurs !

La quadrature du cercle : cette expression signifie : tenter de résoudre un problème insoluble. C'est tout à fait ce que l'on ressent à la lecture de cette nouvelle. Mais qu'a voulu raconter l'auteur ? Qui est ce JE qui prend possession de quelques personnes et les oblige à tuer ? Pourquoi ? Qui est mort ? Tout s'embrouille au fil de la lecture qui devient absolument incompréhensible. Encore une fois, l'auteur n'a pas donné assez de clés au lecteur pour comprendre son histoire.

La bête : un fils de roi se marie pour rassurer ses ministres. Il est très jaloux et ne supporte pas que sa femme soit l'objet de l'admiration des autres hommes. Il soupçonne une liaison entre elle et son principal garde. Il les surprend et la tue, mais le garde s'échappe. Méchant, tyrannique, il fait régner la terreur dans son royaume. Il n'a plus qu'un but : tuer le garde. Il part à sa recherche. A suivre...

Comme dans les autres nouvelles, les informations sont distillées au compte-goutte, toujours de façon si sybilline qu'on se perd vite, et qu'on perd tout intérêt pour la lecture de cette histoire trop sombre.

J'ai nettement ressenti l'impression que l'auteur voulait raconter ses histoires mais sans vraiment les raconter. Il veut les garder pour lui, ne pas trop en dire au lecteur. Il veut garder sa part de mystère et il y réussit trop bien.

Quant aux poèmes, n'étant pas amatrice, je peux toutefois dire qu'ils sont beaux, mystérieux, sombres, tout à fait dans l'esprit des nouvelles, mais ce qui fait la force d'un poème ne fonctionne pas toujours pour une nouvelle.

Ecrite par Marquise, le 08 Novembre 2010 à 15:11 dans la rubrique Roman Nouvelle .
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