Du sang sur la neige
		Henriksen, Levi Edition : Presses de la Cité, Collection : Sang d'encre 2010, 355 pages ISBN : 978-2-258-08032-4 21 €

Dan Kaspersen a fait deux ans de prison. De retour dans son village natal, il n'a qu'une pensée en tête : faire ses bagages et repartir. Rien ne le retient en ces lieux : ses parents sont morts il y a longtemps, son frère Jakob s'est suicidé juste avant sa fin de peine et il n'a ni ami ni amante pour le retenir. Il ne reste que les vieux souvenirs, pas si heureux que ça, et les vieilles rancoeurs. Dans ce froid hivernal, Dan saura-t-il retrouver sa voix et empêcher les vieux fantômes de le hanter ?

Un suicide hypothétique, une agression mystérieuse, des intimidations entre de vieilles connaissances et un cadre figé dans le froid et la neige. Le décor est planté, favorable à des enquêtes policières. Dan est revenu pour enterrer son frère. Mais à la suite de la cérémonie, il s'interroge sur ce geste, pour lui inexplicable. Alors qu'il se débat entre sentiments et souvenirs, le commissaire Rasmussen l’accuse d’une agression contre le grand-père de Kristian Thrane, l’homme à qui il doit son incarcération et qui se comporte avec lui de façon étrange. Il retrouve en effet ce personnage au hasard de ses déplacements et chaque fois les deux hommes sont tendus et les échanges sont menaçants. On ressent bien le poids du passé et on attend du roman qu'il nous entraîne dans le coeur du problème, vers la vérité : suicide, agression, rancoeurs. Que cachent les non-dits ?

Cependant, au fur et à mesure de la lecture, on suit davantage les pas d'un homme, replongeant dans son passé, que les indices d'une enquête quelconque. Oui, Dan est harcelé par la police mais les interrogatoires n'apportent rien de précis aux crimes si ce n'est qu'épaissir davantage le profil mystérieux et bourru de notre héros. Ce dernier, de son côté, ne cherche pas non plus à découvrir la vérité : on le sent plutôt se battre avec ses souvenirs et hésiter à refaire sa vie ailleurs. Les lieux de son enfance sont si pesants qu'on a l'impression qu'il s'y noie. Il se raccroche bien sûr à son oncle, toujours vivant mais pour combien de temps, et à une amourette naissante.

Fort de personnages haut en couleur et d'une atmosphère suggérant le mystère, Du sang sur la neige se lit facilement : des acteurs toujours en mouvement, des rebondissements à la pelle. Mais y voyez plutôt un roman psychologique sur un homme sans racine que le dénouement de plusieurs enquêtes policières. Comme quoi les quatrièmes de couverture sont parfois trompeuses dans la façon de présenter l'histoire.

Déçue par la tournure de la trame, j'ai cependant été prise dans le récit et aimé observer cet homme. Sans voyeurisme, ni critique, je suis devenue sensible à ce que le héros pouvait ressentir quand les gens que vous avez aimé ont disparu et quand ceux qui restent ne vous inspirent plus que méfiance. Au fond de ce vide, l'auteur a voulu cependant allumer un peu d'espoir. Or cela semble si fragile.