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Ferrière, Jean-Pierre

 
  Ferrière, Jean-Pierre
 

Interview de Jean-Pierre Ferrière recueillie par Polgara le 18 août, au domicile de l'écrivain.

Auteur de plus de 60 romans policiers dont certains ont été adaptés au cinéma et à la télévision, Jean-Pierre Ferrière a eu une carrière très riche, faite de rencontres et de hasards. Il nous raconte comment il est devenu écrivain par hasard et a pu rencontrer et devenir l'ami de l'actrice qu'il admirait depuis l'âge de sept ans. Chronique d'une carrière étonnante, d'un vagabondage prolifique dans le monde de l'édition.

Polgara : Bonjour et merci davoir accepté cette interview pour le site des Chroniques de lImaginaire. Afin que nos lecteurs apprennent à mieux vous connaître, je vous propose de nous présenter votre parcours décrivain.

Jean-Pierre Ferrière : Mon parcours décrivain est tout à fait le fruit du hasard parce que je ne me destinais pas du tout au roman, encore moins au roman policier. Ce que je voulais faire depuis lenfance, cest du cinéma, de la mise en scène, pas acteur. Le hasard a fait que jai effectué mon service militaire au Maroc et là-bas jai rencontré des amis de mon père qui travaillaient un peu à Radio Maroc. Comme javais toujours écrit pendant lenfance, cest-à-dire des contes, des récits, des poèmes, on ma demandé d'écrire une pièce pour la radio. Jen ai fait une, jen ai fait deux, puis trois. Cétait très amusant, je ne prenais pas ça au sérieux mais ça marchait bien. Mes premiers textes furent diffusés comme ça. A la fin du service militaire, je suis rentré à paris et jai commencé à chercher du travail parce que je navais aucune recommandation et jai fait les petites annonces pour trouver nimporte quoi parce que, vraiment, je crevais de faim. Jhabitais avec deux amies dans un tout petit local, mes amies avaient un bébé donc tout était pour le bébé ; cétait très marrant mais on avait rien à manger. Jai donc fait les petites annonces du Figaro et je mapprêtais à rentrer dans une usine pour être remplisseur de bouteilles de parfum. Jai vu une petite annonce qui disait « comédienne cherche secrétaire ». Jai eu un flash terrible : jai pensé tout de suite secrétaire homme, pas du tout une secrétaire dactylo etc. comme depuis lenfance, je rêvais de Danielle Darieux, je me suis dit que cétait peut-être elle et jai téléphoné. Je suis allé au rendez-vous et je me suis retrouvé, très timide, avec huit filles qui attendaient avec toute une machine à écrire portative à la main et je me suis dit "je suis complètement un idiot, on recherche une secrétaire et non pas un secrétaire, je nai aucune chance". Mais je suis resté pour savoir qui était la comédienne. Je suis passé le dernier et je me suis retrouvé face à Roger Vadim.

P : Ah ! Quand même !

J-P F : Oui en effet. Il ma dit quil cherchait une secrétaire pour travailler avec sa femme, Brigitte Bardot. Je ny croyais pas une seconde, jétais sûr de ne pas être engagé et donc, on a commencé à parler cinéma pendant un bon moment. Deux jours après, jai reçu un télégramme comme quoi jétais engagé et je me suis retrouvé face à Brigitte Bardot. Bon cétait pas Danielle Darieux.

P : Cétait quand même Brigitte Bardot.

J-P F : Oui et elle était très jeune et très gentille, mais ce nétait pas Danielle Darieux. Je suis resté à son service pratiquement un an. Je passais mon temps à faire des courses pour Brigitte Bardot, je signais de photos pour elle et les envoyaient à des centaines de gars qui étaient à la guerre en Algérie à lépoque. Ils recevaient tous des photos dédicacées par moi etc. Cétait pas très passionnant finalement. Cétait le côté Vadim qui maurait intéressé, malheureusement Pendant ce temps là, une des amies avec qui jhabitais avait connu un éditeur qui dirigeait la collection policière de la chouette en livre de poche ; il cherchait des auteurs. Donc il était en train de former une équipe dauteur et mon amie lui a donné mes textes de radio. Puis un jour elle ma dit «  tu as rendez-vous lundi à huit heures avec un éditeur ». Jy suis allé, léditeur était très sympa, il cherchait des jeunes auteurs français parce quil navait que des auteurs américains dans son catalogue. Il ma dit quil avait lu mes pièces et quil aimait bien ce que je faisais. Il sest lancé et ma donné une avance pour écrire un roman policier. Je nétais pas du tout excité parce que javais lu de tout mais jamais aucun roman policier à part ceux de Simenon. Inconscient, je me lance et en un mois et demi, jécris un roman intitulé « Cadavres en soldes ». Cétait lhistoire de deux surs qui vivaient à Orléans, très dévotes, qui mènent des enquêtes.

* il sort le roman de son bureau et me le montre. Cest un vieux livre de poche écorné dont la couverture montre deux femmes arborant des chapeaux ornés de ruban rose.*

J-P F : Donc, je lui apporte le manuscrit, il le lit et me dit «  Je ne mattendais pas du tout à ça ». Persuadé quil sagissait de mon premier et dernier roman, je lui ai répondu que cétait ça ou rien. Le problème venait que cétait un roman humoristique et que je nétais pas du tout connu. Avec la couverture, le livre tranchait franchement avec les autres qui ne représentaient que des types avec des flingues. En quinze jours, on en a vendu vingt mille exemplaires.

P : Ah, oui, quand même.

J-P F : On en a retiré aussitôt vingt mille, puis dix mille. On en a vendu cinquante mille en tout. Je nai jamais aussi bien vendu depuis, jamais. Rires. Léditeur était sur le derrière, il sattendait à tout sauf à ça.  La maison dédition a reçu beaucoup de courrier des lecteurs demandant la suite des aventures des deux surs. Mon éditeur ma dit que cétait un succès complètement incroyable et inattendu. Il ma demandé den écrire vitre un second. Cest à ce moment là que jai dit à Bardot que je quittais son service pour écrire des romans policiers. Donc jai écrit un second roman policier qui avait une très bonne intrigue, avec toujours les deux vieilles filles que les gens aimaient beaucoup à lépoque et on la vendu aussitôt au cinéma. Japprochais un peu de mon rêve. Deux, trois, quatre, cinq, six, sept romans avec les mêmes personnages qui mont poursuivi. Encore aujourdhui on me dit « ah cest vous les soeurs Bodin ! » ça me poursuit comme une malédiction. Rires. Les sept romans on été réédités en un seul gros volume. Ensuite, jai demandé à mon éditeur de me laisser écrire des romans un peu plus noirs, romanesques avec plus de suspens. Donc en tout, jai publié une vingtaine de romans à la Chouette. Le dernier roman sintitulait « Les veuves ». Je lai vendu au cinéma et jai eu pour interprète

P : Danielle Darieux.

J-P F : Alors là, cétait le paradis. La collection de la chouette sétant arrêtée, je suis passé au Fleuve noir. Mon premier roman pour cette maison dédition a été vendu au cinéma et Michelle Morgan a interprété le rôle principal. À cette époque, javais compris que je ne pouvais rien faire dans le cinéma parce que je navais pas de diplôme. Je me suis donc résigné à écrire des romans : javais pris goût à la chose. En trois mois javais vendu deux romans pour le cinéma, je pensais que cela allait continuer. Il a fallu attendre dix ans avant de revendre un roman au cinéma. Jai écrit une trentaine de bouquins au Fleuve Noir après je suis passé chez Jai lu qui a réédité certains de mes romans parus au Fleuve Noir. Les éditions Jai lu, qui ont été fondées par mon premier éditeur, je retombais en terrain connu. Il ma ensuite demandé des romans inédits avant de partir diriger Le Livre de Poche. Comme le nouveau directeur de Jai lu ne mappréciait pas, même sil ne me connaissait pas, jai suivi mon premier éditeur au Livre de Poche. Il ma édité six romans dont le second « Une femme sans histoire » a été vendu à la télé. Il a donné lieu à un téléfilm vraiment formidable. Les gens de chez Hachette ne comprenaient pas quon me réédite. On ma donc prévenu que lorsque mon éditeur partirait, je ferais partie de ses bagages. Moi, toujours détendu, jai répondu « on verra bien ». Quand mon éditeur a quitté le Livre de Poche, jai suivi, mais tout cela a été fait dune façon très élégante. On ma rendu les droits de mes livres, ce qui ma bien arrangé. Ensuite, je suis passé de maison en maison, jai fait pas mal de radio aussi. Jai fait aussi pas mal de télé, jai écrit pas mal dépisodes de la série Intrigues. Puis finalement, on ma recommandé Noir Délire qui fait surtout des rééditions.

P : Vous écrivez toujours ?

J-P F : Oui, mais je préfère écrire pour le théâtre, ce qui ne marche pas. Ecrire pour la télé est devenu un enfer. Cétait plus facile il y a quinze ans.

P : Pourquoi ?

J-P F : Maintenant, quand vous présentez un projet, tout est reformaté : il ne faut pas ci, il ne faut pas ça, la fin ça va pas, le début non plus d'ailleurs.

P : Il y a un gros cahier des charges ?

J-P F : Voilà, oui. Il y a un énorme cahier des charges et moi, je ne travaille pas comme ça. On ma demandé plusieurs fois de travailler pour une série. On mavait aussi demandé de travailler pour Commissaire Moulin, mais moi je ne veux pas rentrer dans un atelier décriture, cest un cauchemar. Je ne veux pas travailler avec trois ou quatre types qui vont me recorriger. Je veux travailler seul ou pas du tout.

P : Maintenant, on va parler un peu plus de votre approche du roman noir. En lisant vos romans (jen ai lu quatre), jai pu constater que vos personnages sont souvent poussés à agir par le désir de paraître en société.

J-P F : Oui dailleurs Le dernier sursaut est assez emblématique de tout ce que jai fait. Cela parle souvent de quelquun qui pense que sa vie est lamentable et qui, à un moment donné, selon les circonstances du hasard, est amené à changer complètement de vie mais cest souvent pour le pire. Cest ce qui arrivé à Marie-Meurtre. Cest souvent lhistoire dune femme qui met les pieds dans une enquête policière et qui en meurt. Cest  souvent ça. Ce sont souvent des femmes ou une comédienne qui narrive pas à percer.

P : Le cinéma, toujours

J-P F : Oui, toujours. Brusquement, cette comédienne a la chance de sa vie mais elle le paie très cher. Jaime beaucoup cette espèce de dernière chance quon donne à quelquun qui nen a pas eu.

P : Dans vos livres, la mise en scène a une grande importance, vous faites souvent référence au cinéma.

J-P F : Tout à fait. Ce que je dis, cest que je suis un cinéaste raté. Mes romans sont les films que je nai pas tournés. Je ne lai pas regretté finalement. Comme je le disais, jétais très timide et très sauvage, jaurais peut-être pas pu me livrer assez pour faire des films. Au fond, ça marrangeais de misoler pour écrire mes livres et que personne ne vienne memmerder. Cest ce que je voulais. Je ne le savais pas quand jai écrit le premier, mais petit à petit cest venu et cest bien comme ça.

P : Et vous navez jamais eu envie décrire autre chose que du roman noir ?

J-P F : Non, parce que jestime que dans certains de mes romans, la police nintervient pas vraiment comme cest le cas dans Marie-Meurtre, Un diable sur mesure ou Le dernier sursaut. Dans mes livres, il y a toujours un crime ou deux ou trois ou quatre.

P : Et que signifie la ville de Châtignes pour vous ? Vous en parlez souvent dans vos romans.

J-P F : Châtignes est en fait pour moi léquivalent de ma ville natale qui est Châteaudun, qui est une ville de province où je me suis emmerdé ; il pleuvait tout le temps. Châtignes est un modèle réduit de Châteaudun. Cette ville revient tout le temps, dans tous mes romans. Il y a toujours un personnage qui y habite.

P : Vous aimez également reprendre certains éléments entre vos romans. Par exemple, le titre de la pièce Le dernier sursaut, qui met Rosemonde Talbot dans tous ses états et votre roman intitulé Le denier sursaut.

J-P F : Oui, tout à fait. Il y a des noms qui reviennent, ce sont des tics décriture.

P : Vous aimez beaucoup les Brunel, il me semble.

J-P F : Le nom de Brunel ma porté chance alors il y a toujours un Brunel quelque part, et un Vignault aussi. Dans chacun de mes romans, il y a aussi toujours un personnage drôle parce que la vie, cest ça aussi.

P : Je voulais revenir sur une chose dont vous avez parlé tout à lheure. Pourquoi tout le temps des personnages féminins ?

J-P F : Pour moi, une femme qui ment, cest déjà un roman. Un homme qui ment, non ; parce quil ment mal, parce quil ment bêtement. Pour moi, une femme qui ment, cest une ouverture formidable.

P : Comment trouvez-vous vos idées de romans ?

J-P F : Pour moi, un roman commence toujours par une image. Je vois une femme, une fenêtre et cest parti. Je pars sur une image, jamais sur un fait divers, ça ne mintéresse absolument pas.

P : Vous faites partie des auteurs qui travaillent beaucoup avant décrire ?

J-P F : Non. Pour Marie-Meurtre, jaimais le titre et cest parti comme ça. Sinon, je pars sur une image, jai une canevas de quatre cinq pages et je me lance. Je dévie rarement. Cependant, par moment, les personnages prennent le pouvoir, jentends les répliques à fur et à mesure que jécris. Quelques fois, ça prend une tournure un peu bizarre, jen suis même étonné. Ça mest arrivé plusieurs fois, pas dans tous les romans. Pour les meilleurs, ça sest passé comme ça.

P : Cest de linspiration, non ?

J-P F : Oui, ça mest arrivé plusieurs fois. Cest grisant, cest extraordinaire, très amusant. Quand les personnages me soufflent leurs propres répliques, ils ont forcément raison.

P : Vous avez envie de faire quelque chose de nouveau maintenant ?

J-P F : Ecoutez, jai un tiroir plein dhistoires à écrire, en dix ou vingt pages. Est-ce que je vais avoir le courage de me lancer ? Je ne sais pas. Je suis en train décrire des trucs pour la télé qui ne se tourneront jamais, je suis lucide. Je suis aussi sur un film qui ne se tourne pas. Tous les six mois, je donne une option à un producteur qui est un peu escroc

P : Sinon, ce ne serait pas un producteur !

J-P F : Oui, tout cela est très amusant. Mais cétait plus facile il y a vingt ans. À cette période, jétais plus connu. Jai dautres titres qui vont sortir parce que jai pu récupérer mes droits. Javais signé avec un éditeur qui était un peu truand sur les bords.

P : Pour finir, nous allons un peu élargir le sujet.

J-P F : Elargissons.

P : Vous en tant que lecteur, quaimez-vous trouver dans un livre ?

J-P F : En tant que lecteur, les romans policiers, cest pas trop ma tasse de thé, mis à part Patricia Highsmith, que jadore. Mon roman delle préféré sintitule « Lhomme quoi racontait des histoires » parce que je pense que cela me correspond tout à fait.

P : Pourquoi ? Vous ne vous considérez pas comme un écrivain ?

J-P F : Je ne me prends pas pour un écrivain parce que je trouve que cest pompeux, prétentieux. Cest une question très complexe en fait. Et puis lexpression « lhomme qui racontait des histoires », je trouve ça très beau. Jai de lhumour, bon. Jai un style, bon. Mais un écrivain ? Je trouve ça très Goncourt, très académique.

P : Mais pourtant, vous avez écrit plus de soixante-dix-sept romans, vous avez une vraie plume, vous avez tout dun écrivain ! Revenons au sujet, quest-ce que vous aimez trouver dans un livre ?

J-P F : Dans un livre, ce qui me plait, cest surtout un climat ou une atmosphère particulière. Je trouve surtout que Marcel Aimé est un écrivain extraordinaire. Jadore Stendhal, Cocteau, Sartre. Mais je suis surtout un fou de cinéma. Je collection les vieux DVD en noir et blanc. Jai tous les films de Danielle Darieux. Rires. Je considère que la plus grande réussite de ma vie est dêtre devenu un des meilleurs amis de la comédienne que jadmirais quand javais sept ans.

P : Maintenant, que peut-on vous souhaiter pour lavenir ?

J-P F : De faire un nouveau téléfilm avec Danielle Darieux.

Daccord, on va le faire ! Merci d'avoir répondu à nos questions.

Ecrite par Polgara, le 17 Septembre 2007 à 18:09 dans la rubrique Interviews .
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Ecrit par Anonyme le 14 Avril 2010

Bonjour,

Je voulais juste savoir si vous pouviez faire parvenir ce message à J-P. FERRIERES. J'ai bien connu sa maman qui a travaillé en 1968 à l'Ecole des Beaux-Arts à Paris quand, moi-même j'y travaillais, toute jeune fille. Elle me parlait souvent de son fils qui écrivait des romans policiers ; En faisant du rangement chez moi, j'en ai retrouvé un qu'elle m'avait donné - oui, je suis très conservatrice ! -

Je vous remercie

Claire ROBELIN

mon adresse électronique clairobelin@yahoo.fr

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