|
Recherche |
|
|
Coups de coeur
|
|
|
Session |
|
|
Kikekoi |
|
|
Ailleurs |
|
(solidaires08)
(solidaires08)
(solidaires08)
(solidaires08)
(solidaires08)
|
|
|
  |
Fazi, Mélanie |
  |
|
  |
Fazi, Mélanie
|
  |
Interview de Mélanie Fazi recueillie par WongLi Wong Li : Bonjour Mélanie. Tout d'abord, je vous remercie d'accepter de répondre à mes questions. Avant d'entrer un peu plus dans le détail qui concerne le contenu des nouvelles parues dans le recueil Serpentine, j'aurais souhaité vous poser des questions un peu plus générales. Et la première qui me vient à l'esprit est : comment vous est venue l'envie d'écrire ? Mélanie Fazi : Même si ça ressemble à une banalité, je dirais que l'envie d'écrire n'est pas "venue" : elle a toujours été là. Depuis l'enfance, j'ai toujours passé mon temps à inventer des histoires, des personnages, et j'ai eu très tôt l'envie de les concrétiser par l'écriture ou le dessin. Pendant longtemps, c'était plutôt le dessin, d'ailleurs, mais je l'ai abandonné à l'adolescence, par frustration : le résultat ne ressemblait jamais à ce que j'avais en tête. Vers 17 ans, je me suis mise à écrire plus sérieusement des nouvelles et je n'ai plus arrêté depuis. Même en ayant conscience de mes propres limites et des progrès à faire, j'ai vite eu l'impression de trouver un mode d'expression qui me convenait. Et puis j'ai toujours été une lectrice boulimique, et je pense que l'envie de « faire pareil » a dû jouer très fort. Je prenais un tel plaisir à me plonger dans les livres que je rêvais d'être capable, moi aussi, de susciter ces émotions-là chez d'autres personnes. WL : Et je vous rassure, vous y arriver parfaitement bien. Une autre question, à laquelle je suppose il ne va pas être aisé pour vous de répondre, mais qui me brûle les doigts. D'où vous vient ce talent si singulier ? MF : Effectivement, c'est une question à laquelle je ne peux pas répondre : je n'ai pas de recul sur ce que j'écris, pas assez pour avoir un avis critique, ou une idée de ce que les textes peuvent valoir. Tout ce que je sais, c'est que j'essaie d'apprendre et de progresser à chaque texte, plutôt que de me reposer sur ce que je sais déjà faire. Et j'essaie aussi de m'impliquer vraiment dans ces textes, au lieu de me contenter de raconter de petites histoires : je voudrais que le lecteur ressente certaines émotions, alors je m'efforce de les ressentir moi-même pendant la rédaction, et de les projeter dans le texte. C'est assez instinctif, en fait. Mais après, ce n'est pas à moi de juger le résultat : j'en suis parfaitement incapable, même si je suis plus satisfaite de certaines nouvelles que d'autres. Je sais simplement que certains textes ont plu à des lecteurs, et ça me touche énormément. Mais je suis mal placée pour juger des textes eux-mêmes. WL : Il vous sera peut-être plus aisé alors de répondre à la suivante. Vous parlez d'émotions dans vos nouvelles (que vous faites admirablement passer, je ne le répèterais jamais assez !). Les situations triviales dont vous partez, pour entrer petit à petit dans un monde fantastique où tout est permis, les avez-vous déjà vécues vous-même ou bien est-ce de la « simple » imagination (je pense par exemple au salon de tatouages de Serpentine ou encore à l'ambiance de concert de Matilda) ? MF : Tout dépend des textes, mais c'est vrai que j'aime bien partir de situations vécues : à la fois pour parler d'expériences que j'ai envie de partager et pour ancrer le fantastique dans un environnement réaliste. Concernant Serpentine et Matilda, je suis effectivement partie de souvenirs personnels. Je me suis fait tatouer il y a trois ans, une expérience vraiment particulière sur laquelle j'avais très envie d'écrire. D'autant qu'il y a souvent, derrière le choix d'un tatouage, une valeur symbolique très forte, qui me semblait un beau thème de fiction. Pour Matilda, j'ai puisé dans les souvenirs d'une période où je fréquentais beaucoup les salles de concert, et où j'ai vécu des moments assez intenses. Après, une fois que le décor est posé, la réalité et la fiction ont tendance à se mélanger : je me sers de ces souvenirs comme matériau de départ, sans chercher forcément à y coller de très près. Et il m'arrive aussi d'écrire sur des situations très éloignées de mon expérience, comme par exemple dans Elégie, où une mère perd ses deux enfants. J'essaie de me glisser dans la peau du personnage, de deviner sa manière de penser et de ressentir les choses. Sans doute en extrapolant à partir d'impressions que j'ai connues ailleurs. WL : Justement, les impressions que vous amenez et que vous suscitez ont toutes un parfum de quelque chose de noir. Pas forcément mauvais, ni obligatoirement glauque, mais noir. N'arrivez-vous pas à écrire sur des choses joyeuses ou simplement plus gaies ? MF : C'est vrai que j'ai toujours eu un imaginaire assez sombre, mais ce n'est pas vraiment par décision consciente, simplement j'aime ce genre d'ambiances. C'est ce qui m'a attirée en premier lieu dans le fantastique, en tant que lectrice. Et comme je suis quelqu'un d'assez angoissé, j'ai tendance à écrire sur les choses qui me font peur pour mieux les tenir à distance. Je ne sais pas si c'est la seule explication, mais ça joue certainement. Il y a des moments où je ressens le besoin d'écrire des choses un peu moins étouffantes, ça donne des textes comme Le faiseur de pluie : plusieurs personnes m'ont dit avoir été surprises par celui-là, parce qu'il tranchait avec la noirceur générale du recueil. Mais même quand j'écris des choses un peu plus légères, il y a toujours des éléments de noirceur qui ressortent, même si je les aborde avec moins de gravité. Je crois que j'aurais du mal à concevoir un texte autrement. WL : Certaines de vos nouvelles semblent trop courtes (comme cela arrive bien souvent lorsqu'on est complètement plongé dans l'ambiance qui s'en dégage). Désirez-vous les reprendre sous forme de roman un jour ? MF : Ça m'est déjà arrivé, effectivement : les deux romans que j'ai écrits (dont un déjà paru chez Nestiveqnen, et un autre à paraître à l'automne) sont partis de nouvelles que je n'arrivais pas à terminer. Les personnages voulaient prendre plus de place, ils refusaient de se laisser enfermer dans une histoire courte, le résultat était bancal, et j'ai fini par retravailler ces textes sous forme de roman. Mais j'aurais du mal à prolonger des textes déjà parus, par contre : si je laisse publier une nouvelle, c'est que je considère qu'elle a atteint sa forme définitive, qu'elle se suffit à elle-même. Quelle que soit l'idée de départ d'un texte, je commence toujours par le concevoir comme une nouvelle, et parfois je m'aperçois qu'il me faudra beaucoup plus d'espace. Ce qui est encore assez rare : je me sens nettement plus à l'aise dans la nouvelle. Par contre, ça m'amuserait assez de retrouver certains personnages dans d'autres textes, même si je lai très peu fait jusqu'à présent. WL : Peut-être une suite ou un prélude à Matilda (oui, je sais, mais quand on aime, on ne compte pas !) ? Et pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce nouveau roman dont vous parlez ? MF : Pour Matilda, ça m'étonnerait beaucoup : le texte me paraît clos sur lui-même, sans ouverture possible vers une suite ou un prolongement. Et puis il est intimement lié pour moi à la période à laquelle je l'ai écrit, vers 1998. Je ne pourrais plus aborder ce thème de la même façon aujourd'hui. Concernant le roman, il est en fait plus ancien que Trois pépins du fruit des morts, mais il a connu différentes versions : la nouvelle d'origine remonte à 1999. Je suis en train de le retravailler pour publication, et l'intrigue subit pas mal de retouches... Pour le présenter brièvement, c'est un des textes que j'avais situés dans le Sud des États-Unis, à une époque où j'étais très influencée par la littérature « sudiste », de Poppy Z. Brite à Carson McCullers. J'avais envie de retrouver ce genre d'ambiance dans mes propres textes, ce qui a donné plusieurs nouvelles dont ma première publication, Le noeud cajun. Le narrateur du roman est un garçon de onze ans recueilli par une troupe de forains, et qui voyage avec eux à travers le pays. Pour le reste, je préfère ne pas trop rentrer dans les détails : le roman est en train de subir pas mal de modifications. Il devrait normalement paraître d'ici la fin de l'année. WL : Avez-vous déjà trouvé un éditeur pour celui-ci ? MF : Oui, il doit paraître aux éditions Bragelonne. Le roman s'appellera Arlis des forains. WL : J'anticipe peut-être énormément sur le futur, mais avez-vous encore d'autres projets en tête après la sortie de ce roman ? MF : Je n'ai pas d'autres textes en attente de parution pour le moment. J'ai fait une pause l'an dernier pour me consacrer aux deux romans et au recueil, et je n'ai rien écrit de nouveau depuis. Mais j'ai très envie de m'y remettre, je crois que ça ne tardera pas trop. Sinon, parmi mes projets concrets, une de mes nouvelles (La cité travestie, parue chez l'Oxymore en 2002) a été traduite en anglais et doit bientôt paraître aux États-Unis dans le Magazine of Fantasy and Science-Fiction. D'autres textes viennent d'être soumis aux USA, j'attends les réponses. Pour le reste, j'espère donc me remettre très vite à écrire, même si je n'ai encore aucun projet concret. WL : Cela fait déjà une bonne actualité pour vous, ce dont on ne peut que se réjouir. Et, prochainement, y aura-t-il des salons ou des festivals où l'on pourra vous rencontrer ? MF : Je serai au Salon du Livre de Paris le samedi 20 mars, de 13h à 15h sur le stand Nestiveqnen, pour présenter mon roman Trois pépins du fruit des morts. C'est tout ce que je peux annoncer de sûr pour l'instant. WL : Le rendez-vous est donc prit. Il ne me reste plus qu'à vous remercier du temps que vous avez bien voulu me consacrer ainsi que de votre extrême gentillesse. Un dernier petit mot pour les personnes qui liront cette interview ? MF : C'est moi qui vous remercie ! Et pour cette dernière question, n'ayant aucun message transcendant à délivrer, je vais simplement passer mon tour... PS : Les photos sont de Thomas Bauduret
Ecrite par , le 20 Février 2004 à 16:02 dans la rubrique .
|