Le livre des crânes
		Silverberg, Robert Edition : OPTA, Collection : Nébula 1975, 254 pages ISBN : 2-7201-0015-3

Quatre étudiants, plus compagnons de chambrée que véritables amis, décident de partir à l'autre bout des États-Unis, après que l'un deux ait découvert dans une bibliothèque un manuscrit oublié. Celui-ci, après traduction, s'avère proposer au lecteur rien moins que le vie éternelle. Mais elle a un prix : une fois sur place, dans le monastère des crânes en Arizona, deux des quatre jeunes gens devront mourir, afin que les autres puissent accéder à l'immortalité.

À la lecture de ce bref résumé, on pourrait croire que ce roman de Silverberg est une sorte de roman pour adolescents découvrant juste la littérature fantastique. Le coup du manuscrit oublié (décoré comme il se doit de têtes de mort), peut en ce sens paraître assez affligeant. Mais, il n'en est rien. Le roman est remarquablement construit, les chapitres étant tour à tour la vision de chaque étudiant. Les points de vue se succèdent, et une certaines tension émane du fait que le lecteur est le seul à savoir ce qui ce passe réellement dans la tête des quatre protagonistes. On découvre la dimension tragique de leur quête : deux d'entre eux devront mourir. Un devra se suicider et l'autre être assassiné par les deux restants, qui deviendront alors immortels. Chacun imagine sa propre place dans ce carré inquiétant, mais se garde bien de parler aux autres de ce qu'il ressent ou de ce qu'il projette. 

Ballotés entre doutes, désespoir et euphorie, tantôt cyniques ou convaincus, ils font leur route avec l'air de ne pas trop penser à ce qui les préoccupe le plus. Inexorablement, cependant, ils s'avancent vers leur possible perte.

Loin du roman de science-fiction, Le livre des crânes effleure le fantastique, sans jamais tomber dans les grosses ficelles du genre, et se révèle au final bien plus un roman psychologique qu'une aventure surnaturelle. Silverberg nous tient en haleine, par l'omniprésence du doute, et par la tension tragique du prix à payer pour être immortel. Son style s'adapte parfaitement à la nature de chacun des étudiants, nous plongeant véritablement dans l'intrigue. Et, avec talent, il nous rappelle que nos prédictions du futur ne pourrons jamais tenir compte de l'ensemble des facteurs agissant dans l'évolution des évènements.