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Bousquet, Charlotte

 
  Bousquet, Charlotte
 

Interview de Charlotte Bousquet recueillie par Polgara.

A l'occasion de sa participation à la revue Monk, j'ai eu envie de poser quelques questions à Charlotte et de la faire participer au cycle des interviews du Père Lachaise. Si vous ne savez pas encore de quoi il s'agit, rendez-vous ici pour plus d'explications.

Polgara : Charlotte, imagine que tu es morte après une longue vie et que tu viens d'arriver dans l'antichambre de la porte vers l'au-delà. Tu attends qu'on veuille bien te signifier ce qu'il va t'arriver par la suite. Comment es-tu morte ?

Charlotte Bousquet : J'étais vieille et mon mari m'avait quittée peu de temps avant. Nous nous étions promis de nous retrouver, quoi qu'il advienne... J'allais bien, j'étais en bonne santé et si mon écriture ces dernières années était devenue un peu morbide, je n'étais pas déprimée, plutôt... impatiente. Un soir, on frappa à ma porte. Haussant les sourcils, j'ouvris et vis sur le seuil une femme vêtue de noir, avec un visage blême, des yeux insondables - et une broche en forme de faux (au cas où je ne l'aurais pas reconnue)... la Mort, donc était là. Nous prîmes un café, bavardâmes quelques temps, comme de vieilles amies, avant de rentrer dans le vif du sujet - la raison de sa présence. Elle avait une proposition à me faire : si je l'aidais à rétablir son quota en mourant tout de suite, elle me dirait ce que je voulais savoir plus que tout... Où le rencontrer de nouveau.
J'ai accepté, bien sûr ! Et me voici ici, dans l'Antichambre du destin, à la croisée des Mondes des Morts.

P : Et maintenant, comment te sens-tu ?

CB : J'ai un sourire mystérieux, mais il ne se voit pas avec toute cette transparence... Ethérée et impatiente, pour répondre à ta question. Mais ça devrait rapidement passer...

P : Qu'y-a-t-il d'écrit sur ta tombe ?

CB : J'ai été incinérée... Désolée... En revanche, je peux te dire ce qu'on aurait pu y lire, si j'avais été enterrée et non dispersée aux quatre vents du désert :

Ci-gît une femme créatrice de mondes,
Ci-gît une sphinge créatrice d'énigmes,
Ci-gît un monstre aux incessantes métamorphoses,
Qui sait ce qui sous la terre repose ?

P : Dis-moi, tu t'entends bien avec les asticots ?

CB : Si peu, à vrai dire, que je ne suis que cendres. Même si je dois leur reconnaître une utilité certaine dans les descriptions littéraires. Masterton, par exemple, en fait une utilisation tout à fait originale dans Le portrait du mal... Pour tout t'avouer, je n'ai d'affinité ni avec les asticots, ni avec les insectes en général. C'est pour ça que je suis très reconnaissante aux araignées, qui sont certes surprenantes mais ont le mérite de nous débarrasser de ces... trucs.

P : Si tu avais pu emmener quelque chose par-delà la mort, qu'est-ce cela aurait été ?

CB : Je te dirais bien "mon panache", mais ça a déjà été utilisé... Tu sais, j'ai déjà mon esprit, mon âme, mon coeur, mes souvenirs... jusqu'au dernier moment, on me les laissera, je suis déjà très contente de pouvoir être "moi" !

P : Maintenant que tu es morte, vas-tu continuer d'écrire ?

CB : De la poésie, très certainement, mais pas tout de suite... Je ne puis t'en dire plus pour le moment.

P : Tu crois que tes livres vont te survivre ? qu'ils vont devenir des classiques ?

CB : Des classiques, je n'en sais rien. Mais me survivre, très certainement. Tu ne savais pas que les livres contenaient eux-mêmes des mondes possibles, renaissant à chaque lecteur, certes, mais continuant également d'avoir leur temps propre, dans une sorte de domaine étrange, entre le rêve et la réalité ?

P : Maintenant, si tu le veux bien, revenons sur ce que tu as fait de ta vie.

CB : Comme il te plaira...

P : D'abord, es-tu satisfaite de la vie que tu as eue ?

CB : Très.

P : As-tu écrit autre chose que de la littérature de l'imaginaire ? (Si oui, comment tes lecteurs ont-il réagi ?)

CB : Tu sais, toute littérature contient une part d'imaginaire... Mais pour répondre à ta question, avant de faire de la fantasy, du fantastique, j'ai écrit deux romans pour enfants, se passant dans un Maroc contemporain tout à fait réel... Alors, oui, étant assez éclectique dans mes goûts, j'ai écrit d'autres romans jeunesse "réalistes", des articles, un roman graphique, dirigé plusieurs anthologies après Le crépuscule des loups, de la poésie, des essais courts et philosophiques, un recueil à quatre mains avec mon complice Nicolas Cluzeau, même de la chick'litt', un genre parfois injustement boudé et pourtant très drôle. Les lecteurs de littérature générale se sont lancés dans le "bizarre" et les autres... Ils ont suivi aussi. J'ai bien eu affaire à quelqu'un, un jour, qui m'a insultée en me disant que je m'étais compromise, que j'avais "vendu mon âme" et que "je devrais avoir honte" d'écrire des horreurs pareilles (chick'litt'), je lui ai simplement demandé si, lui, n'avait pas honte d'être aussi mal habillé - auquel cas je pouvais tout à fait lui indiquer quelques bonnes adresses - et s'il n'avait pas, lui "vendu son âme" à l'intégrisme littéraire... Auquel cas je lui conseillais vivement de relire mes romans, dans leur intégralité - parce qu'il y a bien une chose que je ne cessais de crier à travers mes écrits, c'est (bien plus que le bon goût vestimentaire) la nécessité absolue du respect de la différence, de l'acceptation de l'autre, dans sa singularité... Il n'est jamais revenu.

P : As-tu écrit tout ce que tu voulais en tant qu'écrivain ?

CB : Bien sûr que non ! j'ai même laissé quelque chose en plan, en partant... Mais crois-moi, le jeu en vaut la chandelle !

P : Finalement, après la parution de ta lettre dans la revue Monk, la créature de Frankenstein a-t-elle parlé ?

CB : Oui, tu l'as ratée d'un quart d'heure environ. Elle m'a même dit qu'elle avait réfléchi à un nom, mais ne savait comment faire pour l'obtenir - pour exister en tant que personne et non en tant qu'entité. Je crois qu'elle voulait que je la baptise, mais je ne me sens pas assez sûre de moi - trop modeste ou pas assez mégalo - pour le faire. Je l'ai donc envoyée du côté du Du'at... tu vois, c'est la porte, là-bas... Oui, le grand gouffre noir, gardé par ces deux statues colossales d'Anubis. Je sais que l'Ouvreur des chemins est de bon conseil et qu'Isis et Osiris sont des divinités bienveillantes. Capables de comprendre - et de le nommer.

P : Comment tes lecteurs ont accueilli la parution de ton roman Elegies de Cendres ?

CB : Ils étaient assez surpris, car il est assez lent à se mettre en place. Les personnages de la première partie, notamment, sont assez froids... Et il y a certaines choses assez choquantes j'imagine - qui ne l'étaient pas dans la Rome Antique, cela étant. Et comme, sans être complètement maniaque, j'essaie de rester assez "historique"... Finalement, l'accueil a été plutôt bon. Les illustrations de mon époux ont énormément contribué à donner une ambiance - un peu à la manière des romans graphiques - et puis les lecteurs se sont attachés aux principaux protagonistes et à leur histoire... Finalement, il a eu plusieurs retirages, ce qui est plutôt bien, non !!!

P : Quel a été ton meilleur souvenir d'auteur ?

CB : Il y en a plusieurs, mais en voici un qui m'a particulièrement touchée : une lectrice, rencontrée au Salon du livre... Une jeune fille, qui avait lu tout, absolument tout ce que j'ai écrit, et voulait savoir comment obtenir ma thèse... je raconte assez mal, mais tu ne peux pas savoir ce que cela fait plaisir, à quel point c'est émouvant de se dire qu'on a réussi, à ce point, à toucher quelqu'un...

P : Et ton pire souvenir ?

CB : Lorsque mon second roman (Le défi de Zaïna) a été publié et que je me suis aperçue non seulement que la couverture créée par mon mari (et refusée) avait été intégralement plagiée (en moche), mais aussi que mon texte avait été corrigé, modifié sans que je sois mise au courant.

P : En tant qu'écrivain, quel est ton plus grand regret ?

CB : Que les auteurs et les éditeurs dits "petits" se fassent la guerre au lieu de s'entraider... Poire et utopiste, j'étais, poire et utopiste je reste.

P : En fait, il semblerait que l'attente soit interminable. Avant de te dire où tu vas aller, on te donne l'occasion d'organiser un dîner avec tous les auteurs morts de ton choix. Qui invites-tu ?

CB : Il y a plein d'auteurs qui ne s'entendraient pas... J'adore Marcel Proust, J. O. Curwood, etc. Mais ça ne collerait pas. Alors je crois qu'un dîner en tête à tête avec mon cher François Villon suffira !
Ou un apéro à trois, si tu veux rester avec nous ?

P : C'est gentil, mais non, j'ai des chroniques à écrire. Tu sais, les autorités de l'au-delà ont un sens de l'humour particulier. Je viens d'apprendre qu'elles te donnent le choix. Soit tu retournes sur terre en tant que n'importe quelle chose vivante sauf un être humain, soit tu intègres une oeuvre de fiction et tu incarnes un personnage. Que choisis-tu ?

CB : Ce qui rejoint le secret que m'a révélé mon amie à la faux, avant que je meurs... Tu te souviens de Bahast ? Mais si, ce magicien un peu imprévisible, trop curieux et maladroit de la Trilogie du coeur d'Amarantha ? Il se trouve que mon cher et tendre a toujours eu un gros faible pour lui ! Alors je crois que je vais ouvrir cette porte, là... Et m'incarner en Epicte, son grand amour !
Ashen BaXt, comme disent les Czardi !

P : Merci Charlotte pour tes réponses !

Ecrite par Polgara, le 03 Juin 2007 à 23:06 dans la rubrique Interviews .
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